Revanchard en 2025, après avoir passé plus de la moitié de la saison loin de la compétition à cause d'une blessure rare et handicapante, Victor Lafay s'est confié à Vélofuté. Il nous révèle les secrets de sa blessure et de son retour. Sa motivation, son programme de course et sa place chez Decathlon AG2R, qu'il a rejoint l'hiver dernier.
Victor Lafay - Decathlon AG2R : "Dépasser mon niveau du Tour de France en 2025»
L'année 2024 de Victor Lafay a été gâchée par une blessure particulièrement gênante. Si il a réussi à courir près de 40 jours de course en fin d'année, c'était avant tout pour préparer 2025. Retour sur son année difficile et projection sur la saison prochaine.
Comment s'est passée la trêve et ton début de stage ?
J’ai fait un hiver plutôt sage avec des vacances sportives, donc ça m'a permis de garder une bonne forme. Dès le stage, la condition est bonne. Je pense même que je n'ai jamais eu un aussi bon niveau en décembre.
Penses-tu que cela est dû à ta reprise tardive ?
Oui je pense et puis le fait d'avoir terminé aussi tard, en Chine fin octobre et étant en pic de forme, ça m'a bien aidé. Et puis comme j'ai conservé de l'activité physique durant la coupure, c'est le côté positif. Je n'ai pas ressenti le besoin de couper cet hiver comme j'ai repris très tard la saison, sur le Tour de l'Ain fin juillet. J'avais repris l'entrainement fin juin réellement. J'ai fait énormément de randonnée par exemple.
On t'a peu vu en compétition chez Decathlon AG2R, tu peux nous expliquer un peu les problèmes que tu as rencontrés ?
Ça s'est passé lors d'une sortie en hiver. Les collants me compressaient fort. Au bout de trois heures, j'ai commencé à avoir très mal. J'ai tenté de rentrer au plus vite. J'avais du mal à monter les escaliers. Au début je pensais à une tendinite donc je me suis dit qu'en partant en stage, deux jours après, je pourrais récupérer grâce au kiné. Cependant, la douleur n'est pas passée donc je suis rentré faire des examens. On a découvert que j'avais un syndrome fémoropatellaire. C'est lorsque la rotule vient frotter le fémur qui crée une inflammation du cartilage. On a galéré à soigner cette blessure. J'ai eu beaucoup de témoignages de personnes qui avaient ça depuis dès années sans parvenir à guérir. Je n'arrivais pas du tout à pousser sur ma jambe. Mon quadriceps avait diminué de volume et on a voulu compenser avec de la musculation. Ce choix a été une erreur. On a compris que la muscu n'aidait pas car la rotule avait besoin de retrouver de l'espace par rapport au fémur et que la musculation allait à l'encontre de ça. En mai, on a axé les soins sur tous les tissus du genou pour retrouver un maximum d'élasticité et de souplesse, donc que du travail avec le kiné. Très rapidement, en quelques semaines, je n'avais plus de douleur. C'est difficile car on émet des hypothèses mais c'est difficile de savoir ce qui va marcher ou non. Mais dès qu'on a trouvé, la récupération s'est fait vite.
Ça a dû être terrible mentalement?
Oui très dur. Je me demandais même si j'allais pouvoir remonter sur un vélo. Je ne pouvais pas pédaler mais dès qu'on a trouvé le remède miracle, au bout de deux semaines je faisais 1h30, au bout de 4 semaines des sorties de 5h avec un peu de douleur et 6 semaines après, je n'avais plus aucune douleur.
Est ce que tu avais déjà une fragilité au niveau du genou?
Non pas vraiment, mais on a découvert que j'avais une fibrose. Ça tirait sur la rotule donc ça n'a pas aidé. Il y a eu aussi la chute sur le Tour, au dessus du genou, qui m'avait enlevé de la peau. Tous ces éléments ont fait que je n'ai pas pu récupérer naturellement.
Tu vas donc reprendre la saison 2025 sur de bonnes bases ?
Oui je n'ai plus aucune douleur sur le vélo. J'ai conservé une fois par semaine la course à pied car cela semble me faire du bien.
A quoi tu t'attends en 2025 ? C'est vrai que depuis ta victoire sur le Tour, tu étais au sommet de ta carrière, mais après coup, plus rien à part ton transfert chez D4.
Il s'est passé beaucoup de choses et en même temps pas grand chose (rire). Mais j'aborde la saison avec confiance. Ma performance en Chine m'a bien aidé car j'ai bien fini l'année. L'équipe m’a concocté un beau programme. Je vais reprendre sur la Marseillaise et Etoile de Bessèges. Et puis avec la dynamique incroyable de l'équipe, j'ai vraiment hâte d'attaquer.
Est-ce que pour retrouver ton niveau, ça passe par courir beaucoup ?
Non non, ça c'est les anciennes méthodes. Aujourd'hui je préfère courir moins mais être bon tout le temps. En fin de saison j'ai couru beaucoup, quasi 40 jours de courses mais c'était pour compenser le manque de compétition et préparer la saison suivante. Ce bagage m'a servi pour forger des bases solides pour 2025.
Quels sont tes objectifs pour 2025 ? Les Ardennaises ?
Mes deux gros objectifs seront la Flèche Wallonne et Liège. Surtout la Doyenne d'ailleurs car c'est une course que je n'ai jamais préparée et qui convient à mes qualités. C'est un Monument, une course magnifique avec un concurrence énorme. C'est une course qui me fait rêver.
Est-ce qu'on te verra sur la Classic Besançon ou Jura comme par le passé ?
Pour le moment non, peut-être que je ferais la Classic Besançon, à voir, que j'avais gagnée en 2023, mais rien de sûr.
On avait imaginé un calendrier pour toi, qu'en penses tu ? Marseillaise - Bessège - Var - Drôme Classic - Tirreno - Pays Basque - Ardennaise.
T'en es pas loin (rires). Je ne vais pas faire la Drôme et je vais faire un petit ajout, Milan-San Remo. Je pense que c'est une course qui peut me convenir. Faut que j'arrive à retrouver un peu de punch. Les bosses dans le final me conviennent. Il faut aussi une pointe de vitesse. Bon, je ne m'attend pas à gagner dès ma première année hein même si il faut toujours viser la victoire. Je pense que le fait de ne pas connaître la course, notamment la descente du Poggio, est un désavantage mais j'ai hâte.
Est ce que tu souhaites accomplir quelques chose de particulier dans ta carrière ?
Oh c'est une très bonne question. Je pense que le Graal serait de gagner Liège. Ou un Monument mais Liège me fait vraiment rêver. Le Lombardie ? Je pense que ça dépend du parcours. Souvent le tracé est un peu trop grimpeur pour moi, des efforts un peu trop longs, surtout si ce sont des efforts répétés. Après, les Cannadiennes, le GP Plouay ou la Clasica San Sebastian sont des courses qui correspondent bien à mes qualités. Si j'arrive un jour à gagner une de ces courses, ça me ferait plaisir.
Et la Flèche Wallonne?
Oui aussi mais je pense que je préfère faire un podium sur Liège que de gagner la Flèche. Je pense que c'est une performance plus grande.
En tout cas, tu sembles vraiment motivé ça fait plaisir. Tu n'as jamais perdu le moral ?
Non pas vraiment. Il fallait rester calme et penser à reconstruire de bonnes bases. Il ne faut pas aller plus vite que la musique. On peut essayer mais ça ne marche pas. Tu vois, j'ai essayé d'aller sur la Vuelta en me disant, si je gagne une étape c'est bien mais la réalité m'a vite rattrapé. Avec 1 mois et demi de vélo, c'était impossible sur un GT. Y a toujours des mecs qui sont juste mieux préparés que toi dans ce cas de figure. Mais pour 2025, je peux être confiant.
Comment as tu vécu ton départ de chez Cofidis ?
J'avais besoin de changement. Je suis resté longtemps chez Cofidis et j'avais besoin d'arriver dans une équipe où je devais reprouver mon niveau. Sortir de ma zone de confort, avoir de la concurrence. Et puis le projet de Decathlon m'a vraiment attiré. L'équipe allait vraiment prendre un gros virage et avec le recul, je pense que je ne me suis pas trompé. j'ai senti l'émulation dans toute l'équipe et puis en plus, la formation est basée dans ma région. Mais c'est surtout le projet qui m'a convaincu que je pouvais dépasser le niveau que j'avais chez Cofidis, sur le Tour de France 2023.
C'est fou que tu aies senti cette émulation car tous les gens en parlent. Ça a vraiment joué positivement ?
Oui, vraiment. Déjà, ça m'a beaucoup aidé quand j'étais blessé et puis dans mes premières visios, j'ai senti que tout le monde était motivé comme des gamins. Tout le monde est investi, à fond dans le projet donc forcément ça joue sur le moral et ça donne envie de s'investir aussi au maximum. Et ça prouve que derrière, quand tout le monde s'amuse, les résultats arrivent d'eux mêmes.
Ton adaptation s'est bien déroulée ?
Oui très bien. Je connaissais déjà plusieurs coureurs et puis j'ai couru chez eux en jeune donc c'était presque un retour à la maison. Quand je suis arrivé l'hiver dernier, j'ai senti que le groupe était super sain et que ça matchait. Bon évidemment, je n'ai pas vraiment pu prendre part à la réussite de l'équipe en 2024 mais j'espère qu'en 2025, je performerais à la fois pour moi et pour l'équipe, pour leur rendre la pareille.
Tu seras leader sur toutes les courses ?
Je serai souvent leader unique ou coureur protégé, excepté sur le Tour de France où il y aura Felix Gall pour le général. Mais partager le leadership ne me dérange pas, au contraire c'est une force. L'un attaque puis l'autre. Si on joue le jeu à 100%, une équipe avec plusieurs leaders peut vraiment faire mal.
Propos recueillis en exclusivité par Vélofuté
Qu'il évite déjà les problèmes phyisques ca serait bien. Ensuite on verra