Avec 23 victoires en haute montagne, Nairo Quintana figure à la deuxième place de notre classement des meilleurs grimpeurs du siècle. Pur grimpeur dans la lignée des coureurs colombiens, il fut le meilleur adverse de la surpuissante Sky en montagne.
En 2013, au sortir du premier Tour de France remporté par Chris Froome, Nairo Quintana a marqué les esprits. A seulement 23 ans, le petit Colombien a pris date pour l’avenir. Sa 2e place au général et son maillot blanc font de lui le futur du vélo. Beaucoup le voyaient comme le meilleur grimpeur des années à venir, tant son style, son gabarit et ses accomplissements récents correspondaient à ce statut. Il sera le meilleur en haute montagne, là où l’oxygène se fait plus rare et où chaque gramme de masse corporelle se fait plus lourd. Près de 10 ans plus tard, Nairoman n’a certes pas remporté le Tour de France comme on pouvait le prédire, mais il a confirmé, pendant au moins cinq saisons, qu’il était l'un des meilleurs grimpeurs du monde. Pas étonnant qu’il figure à la 2e place de notre classement, même s’il aurait pu viser la 1ère, vu son potentiel.
Pourquoi lui ?
Tout, chez Nairo Quintana, justifie qu’il figure dans ce classement. Son gabarit, d’abord : 1m67 pour 59 kg, le poids et la taille idéale pour voler sur des pentes raides. Sa nationalité, ensuite : dans la lignée des grands petits grimpeurs colombiens, il a profité de son enfance dans les montagnes sud-américaines pour acquérir des propriétés physiques exceptionnelles, notamment sur le plan respiratoire en haute altitude. Son potentiel chez les jeunes, ensuite : vainqueur du Tour de l’Avenir 2010, devant d’autres grimpeurs à fort potentiel (Pantano, Landa, Bardet, Atapuma), il ne sortait pas de nulle part.
Son palmarès, surtout : depuis son passage chez les professionnels en 2012 au sein de la Movistar, il a amassé 23 victoires en montagne, en plus d’avoir terminé 11 fois premier des favoris sur une étape montagneuse en Grand Tour. Aboutissement de ces bouquets collectionnés, il a remporté le Giro 2014 et la Vuelta 2016, les Grands Tours correspondant le mieux aux purs grimpeurs de sa trempe. Il aurait même pu en remporter plus si ses lacunes en chrono ne l’avaient pas freiné, ou la malchance, comme sur la Vuelta 2014. Mais en montagne, il fut, pendant quelques années, le seul à pouvoir désarmer le train terrible de la Sky. S’il a connu un coup de moins bien entre 2018 et 2020 sur les Grands Tours, il a poursuivi sa moisson en montagne et glané de très nombreuses étapes de prestige. Avec 8 étapes de GT à son palmarès, dont 6 avec une arrivée au sommet, il figure dans les 3 meilleurs du siècle. Bref, Kingtana est certainement le meilleur pur grimpeur du siècle, et celui qui correspond le mieux à l’image du grimpeur, petit, fin, volant sur des pentes assommantes.
Sa plus belle envolée : Col du Portet, Tour de France 2018
Autant dire qu’avec 23 victoires, on avait le choix. Le nombre d’envolées victorieuses et prestigieuses est important. Celle que l’on a choisi de conter n’est pas celle qui a eu le plus d’impact sur son classement général, comme au Semnoz en 2013. Mais elle est symbolique. En 2018, Nairoman n’est pas dans sa meilleure saison. Il est même assez loin au général, 8e à 4’23 de Geraint Thomas, et ne paraît plus dans le coup pour le podium. Mais le jour de l’étape reine, reliant Bagnères-de-Luchon au Col du Portet, Quintana a montré qu’il était bien un des meilleurs grimpeurs du monde, même sans ses meilleures jambes.
Malgré des ennuis mécaniques plus tôt dans l’étape, Quintana a attaqué au pied de l’ultime ascension, longue de 16,7km, à 8,7% de moyenne et terminant à 2206m d’altitude. De quoi faire de ce Col du Portet un des plus durs de notre classement des cols. Il fait rapidement le trou sur les favoris, qui ne peuvent simplement pas le suivre. Dan Martin a bien essayé, en vain. La stratégie de Movistar est aussi payante : parti plus tôt en contre, Valverde lui offre un précieux relais. Le petit Colombien reprend les échappés un à un à une allure folle. Il s’impose finalement avec près de 50 secondes d’avance sur les favoris. S’il termine ce Tour de France à une anonyme 10e place, il a su se montrer le plus fort sur les routes les plus élevées de cette édition. En pur grimpeur qu’il est.
Victime de la domination de la Sky
Que manque-t-il réellement à Quintana pour figurer plus haut dans ce classement ? Autrement dit, premier ? Difficile à dire, tant Kingtana semble incarner le grimpeur par excellence. Ce qui est sûr, c’est qu’il s’est moins imposé au sommet en GT que le coureur qui domine ce classement. Contrairement à ce dernier, Quintana n’a jamais été en mesure, du moins sur le Tour de France, de disposer d’une équipe capable de mener et de cadenasser la course pour protéger le maillot jaune et annihiler toute velléité d’attaque adverse. Finalement, être tombé au même moment que la surpuissante Sky est bel et bien ce qui a empêché le Colombien d’être sacré. C’est le hasard des générations et du temps, mais Nairo Quintana restera, malgré ses récents ennuis, l’un des tout meilleurs grimpeurs du 21e siècle.
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