Il existait un Peter Sagan avant même que le Slovaque ne soit venu au monde. Un coureur capable de lutter pour le maillot vert sur le Tour, de briller sur les classiques flandriennes mais aussi sur l’Amstel Gold Race ou Milan-SanRemo. Cet homme, c’était Johan Museeuw. Le Belge aura gagné sur tous les terrains, même il gardera toujours ce regret de ne jamais avoir triomphé sur la Primavera, ni d’avoir rapporté la tunique verte du classement par points jusqu’aux Champs-Elysées.
Mais, au 21e siècle, celui que l’on appelait le "Lion des Flandres" s’était spécialisé depuis longtemps dans les courses pavées, avec succès. Vieillissant à l’aube des années 2000 (35 ans), Museeuw a tout de même glané ses neuf derniers succès au 21e siècle, dont quatre courses pavées et 2 Monuments. Gigantesque, en quatre ans et demi. Suffisant pour figurer à la 7e place de notre classement.
Pourquoi lui ?
On n’appelle pas un coureur le "Lion des Flandres" pour rien : Johan Museeuw était un vrai spécialiste des pavés. Bien moins grand et massif que les Boonen ou Cancellara (il rend 8cm et 11kg à son compatriote), il n’en était pas moins puissant. Surtout après son retour de blessure, après sa grosse chute dans la Trouée d’Arenberg en 1998 (fracture de la rotule gauche). Il aurait pu ne jamais s’en remettre, à déjà 33 ans. Il aurait pu, surtout, ne jamais revenir sur les pavés et dans l’Enfer du Nord. Mais le "Lion des Flandres" ne pouvait pas partir dans d’ultimes coups d’éclats. Et de nouveaux succès pavés. Car si Johan Museeuw occupe la 6e place de notre classement, c’est avant tout car il a grandement forgé son palmarès du 21e siècle sur les Flandriennes.
Entre 2000 et sa fin de carrière, au printemps 2004, le Belge ne remporte certes "que" quatre courses pavées, mais il a toujours préféré la qualité à la quantité : deux Paris-Roubaix (2000 et 2002) et deux Het Volk (2000 et 2003), voici ce qui viendra garnir un peu plus son palmarès. Ils ne sont que vingt à avoir gagner deux fois l’Enfer du Nord et lui y est parvenu, à 34 et 36 ans. Il a d’ailleurs longtemps été le plus vieux vainqueur de Paris-Roubaix au 21e siècle, avant que Matthew Hayman ne s’y impose en 2016, à 37 ans. Des succès auxquels il convient d’ajouter deux podiums sur les Monuments (2e de Roubaix en 2001), passant tout proche du doublé en 2002 (2e du Tour des Flandres). Malgré une fin de carrière (et une après-carrière) marqué par les affaires de dopage, Johan Museeuw reste l’un des plus grands coureurs pavés de ce siècle et il est logique de le voir intégrer notre Top 10.
Son plus beau printemps : la renaissance de 2000
On aurait pu choisir son printemps 2002, où il passe tout près du doublé Ronde-Roubaix qui lui aura toujours échappé. Mais aucun période n’aura été aussi faste et aussi importante dans la fin de carrière de Johan Museeuw que le printemps 2000. Depuis sa grave blessure sur Paris-Roubaix 1998, le Belge n’a glané qu’un seul succès et, pire encore, n’a pas pesé sur l’Enfer du Nord en 1999, relégué à près de trois minutes de son … coéquipier et vainqueur Andrea Tafi. La Mapei-Quick Step signe même un fabuleux triplé ce jour-ci, mais sans lui. On le pense alors fini mais c’est mal connaitre le "Lion des Flandres".
Revigoré, Museeuw aborde 2000 avec confiance et trouve rapidement le chemin du succès, en s’imposant en solitaire sur l’Het Volk puis, surtout, sur la Flèche Brabançonne. Pas vraiment une course pavée, mais un passage obligé ou presque pour le Belge dans sa quête d’un nouveau Monument. A chaque fois qu’il y a triomphé, il a remporté Roubaix (1996) ou le Tour des Flandres (1998) ensuite. 2000 ne fera pas exception à la règle. Bien aidé par la force de frappe (dissuasive ce coup-ci) de sa formation Mapei-Quick Step, Museeuw passe à l’attaque à 40km de l’arrivée en compagnie de Frankie Andreu, qu’il lâchera rapidement. Seul en tête, le Belge comptera près de 3minutes d’avance sur un peloton qui se regarde et finit par réagir, trop tard. Gérant parfaitement son effort, Johan Museeuw parvient à conserver 15’’ d’avance sur un groupe de sept coureurs réglé par Peter Van Petegem et s’offre son deuxième Paris-Roubaix, quatre ans après le premier. Il en ajoutera un troisième, deux ans plus tard, au terme d’un numéro de plus de 80 kilomètres.
L’homme de deux siècles
Que manque-t-il à Museeuw pour figurer plus haut dans ce classement ? Que l’on compte toute sa carrière, tout simplement. Ayant débuté chez les professionnels en 1988, le Belge n’a donc couru que la fin de sa carrière au 21e siècle, lui qui qui avait débuté seize ans plus tôt, au 20e siècle. Si notre Top 10 avait pris en compte tous ses résultats, le "Lion des Flandres" ne serait pas 6e mais 2e. Il faut dire qu’avant 2000, il avait conquis à trois reprises le Ronde (1993, 1995, 1998), une première fois Paris-Roubaix (1996) auxquels il convient d’ajouter deux GP E3 (1992, 1998), deux A Travers la Flandres, alors appelé A Travers la Belgique (1993, 1999) et le classement des 3 Jours de la Panne, en 1997.
Son palmarès pré-2000 vaut plus de 700 points de plus que son palmarès post-2000. A lui seul, il lui aurait valu la 3e place de notre Top 10. Le cumul des deux lui aurait donné la 2e place, et assez nettement. Mais, même en ne comptant que ses résultats depuis 2000, le Belge aurait pu être plus haut, s’il n’était passé à côté de la majorité de ses Tours de Flandres après sa blessure. Sans oublier ce fameux Paris-Roubaix 2004, l’avant-dernière course de sa carrière. Au chaud dans le groupe qui se jouera la gagne sur le Vélodrome, Johan Museeuw attend le sprint, où il sera le favori vu sa pointe de vitesse, pour égaler le record de succès de Roger de Vlaeminck. Malheureusement, il crève dans le dernier secteur de Heim, l’un des plus faciles, et terminera 5e. Une place de mieux que dans notre Top 10.
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