Depuis sa 2e place sur la Vuelta 2021, Enric Mas a clairement passé un cap et se relève désormais au niveau des tous meilleurs mondiaux. Si son palmarès n’est pas encore à la hauteur de son potentiel, l’Espagnol de 28 ans est l’un des rares à régulièrement rivaliser avec Tadej Pogacar. De quoi en faire un véritable adversaire du Slovène sur le Tour ? C’est un pas que l’on franchirait presque.
Qu’il semble loin le temps où Enric Mas était un sujet de raillerie, comparé à Rigoberto Uran pour son style si passif en course. Cela ne fait que deux ans mais le grimpeur espagnol n’est plus du tout le même coureur. Plus depuis cette fameuse Vuelta 2021 où il fait longtemps jeu égal avec Primoz Roglic. Sa 2e place finale est un déclic pour le Majorquin dont le niveau et le caractère en course vont totalement changer en 2022. Libéré, bien plus leader que par le passé, Enric Mas ose et se montre plus offensif, à l’image de son attaque dans le Krabelin sur le Tour du Pays Basque, à 40km de l’arrivée de la dernière étape. Malheureusement pour lui, l’Espagnol joue de malchance.
Le dernier à avoir battu Pogacar
Victime d’une chute dans la descente de Carpagna sur la course aux Deux Mers (il était 4e virtuel), puis dans celle du Krabelin au Pays Basque alors qu’il tentait de renverser la course et avait distancé Evenepoel, le leader de la Movistar remet ça sur le Dauphiné. Le paroxysme de ses malheurs aura lieu sur le Tour de France, où il connait des maux de ventre sur l’étape du Granon avant de contracter la Covid en dernière semaine. Mais sa fin de saison est stratosphérique, avec une 2e place sur la Vuelta et le Tour de Lombardie. Il a surtout été le bourreau de Tadej Pogacar sur le Giro d’Emilia, faisant exploser le Slovène dans la montée de San Luca. A jour, il reste d’ailleurs le dernier coureur à avoir battu le double vainqueur de la Grande Boucle…
"Enric est le seul à avoir pu rivaliser avec Pogacar en 2022", déclarait son directeur sportif Paxti Vila à Marca en début d’année, oubliant visiblement un certain Danois de la Jumbo-Visma. Mais l'Espagnol est pour le moment le seul à lutter avec lui depuis, leur rivalité illuminant le Tour de Lombardie en fin de saison dernière ou sur le Tour d’Andalousie, à Alcala et Iznajar, la semaine passée. Même si le Slovène a toujours gagné au sprint, Mas est devenu un puncheur de très haut niveau. Il est également l’un des meilleurs grimpeurs du monde, lui qui a battu Roglic, Hindley et Evenepoel sur la Vuelta et rivalisé avec Vingegaard sur Tirreno. Pur spécialiste des Grands Tours (3x 2e de la Vuelta, 5e du Tour 2020), Mas aime la haute altitude (premier des favoris à la Sierra Nevada l’an dernier, 3e au Gamoniteiru en 2021, 6e au col de la Loze en 2020) et est souvent très fort en troisième semaine.
"Il faut que je coure plus agressivement lors de mes meilleures journées"
Le parcours du Tour 2023 sera en plus à son avantage, avec un tout petit contre-la-montre (22km en montée) et de nombreuses étapes (Bilbao, Laruns, Puy-de-Dôme) taillées pour ses nouvelles dispositions de puncheurs des montagnes. Mais, si la Movistar a bien débuté la saison et a retrouvé de la cohésion depuis l’été passé, l’équipe espagnole n’aura pas les moyens d’accompagner Mas en haute montagne, qui se retrouvera seul face aux armadas INEOS Grenadiers, Jumbo-Visma et UAE Team Emirates. Il devra également passer un nouveau cap, n’ayant jamais joué les premiers rôles sur le Tour, finissant à plus de 6 et 11 minutes de Pogacar sur les éditions 2020 et 2021. Mais le Enric Mas de 2023 n’a rien à voir avec celui d’il y a deux ans.
"J'espère que ce sera l'année de ma consécration", avouait-il en début de saison pour MundoDeportivo, conscient de ce qui le sépare encore d’un premier Grand Tour et du maillot jaune. "J'aurais pu gagner plus de temps par rapport à Evenepoel sur la Sierra de la Pandera et la Sierra Nevada, confiait l’Espagnol à l’Het Nieuwsblad en novembre dernier. J'en ai tiré des leçons pour l'avenir, il faut que je coure plus agressivement lors de mes meilleures journées. C'est quelque chose d'être sur le podium d'un Grand Tour mais j'ai vraiment besoin de gagner dorénavant". Un besoin qui se comprend pour celui qui ne compte que six succès en carrière et qui espère bien ouvrir son compteur sur une course par étapes majeure, pourquoi pas dès Tirreno-Adriatico, dont il pourrait bien être le grand favori.
"Son heure est venue"
Il ne le sera pas en juillet sur le Tour de France mais l’Espagnol n’est plus un vague outsider au podium : c’est aujourd’hui le grand favori pour le 3e place. Plus qu’un Richard Carapaz. Plus qu’un Hindley, un Landa ou un Gaudu. Il est même devenu un sérieux adversaire pour Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar. "Je pense que son heure est venue, expliquait Paxti Vila. C’est un cycliste mature et c’est son heure. Il a déjà montré qu’il pouvait être avec les meilleurs. Ce n’est pas quelque chose que nous pensons et qui ne s’est pas encore produit, mais c’est quelque chose qui s’est déjà produit". S’il finit souvent par le battre au sprint, Pogacar s’en rend compte course après course. Reste à le faire désormais sur la plus belle scène du monde, le Tour de France.
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