Après une saison 2023 catastrophique, AG2R La Mondiale, soutenue par Décathlon, est le véritable tube de l’année avec 24 victoires et une 3e place au classement UCI en 2024. Une transformation profonde, due à de nombreux changements stratégiques, qui va se tester à l’épreuve du Tour de France.
« L’ambition est de retrouver une place correcte au classement mondial, à savoir entre la 12e et la 14e place, mais aussi de remporter des épreuves importantes », nous confiait Vincent Lavenu en début de saison. Les mois ont passé et le moins que l’on puisse dire, c’est que Décathlon-AG2R-La Mondiale Team a dépassé les attentes de son directeur sportif en 2024. Avec plus de 10 000 points UCI, soit 1 000 de plus que sur toute l’année 2023, les Savoyards pointent à la 3e place du classement par équipes, très loin de la 18e place finale de l’an passé. Autre preuve de leur ascension, l’impressionnant nombre de victoires : 24, ce qui fait de ce millésime 2024 le meilleur de l’histoire de la structure depuis 2003 (27 victoires). Bref, la métamorphose est exceptionnelle. Mais comment Lavenu and co. ont-ils transformé une équipe en perte de vitesse en seulement quelques mois ? Voici notre analyse.
Une restructuration et une professionnalisation de l’équipe entamées dès 2022
En réalité, les changements au sein de l’équipe ne datent pas de fin 2023, mais ont été entamé dès juin 2022. Après de longues discussions et des études menées en interne, l’entreprise AG2R La Mondiale prend une décision stratégique clé : le rachat de France Cyclisme, la structure qui gère l’équipe AG2R-Citroën Team, alors en grands manques de résultats. L’objectif : prendre le contrôle opérationnel de l’équipe et ainsi y insuffler une nouvelle dynamique, comme nous l’expliquait Benjamin Abitbol, directeur chez EY-Parthenon, en début d’année. La reprise est actée en juin 2022 et Vincent Lavenu, fondateur et propriétaire de sa structure, cède ses parts pour se concentrer sur la direction sportive. S’en suivent de nombreuses actions et décisions opérationnelles et stratégiques profondes : nomination d’un nouveau gérant, Dominique Serieys, changement de nombreux process, implication de l’actionnaire dans de nombreuses décisions, etc.
Vincent Lavenu nous racontait, en février dernier, comment l’équipe avait mis en place un « comité de recrutement », pour rendre le processus plus poussé : « On réfléchit sur de nombreuses données et paramètres auxquels les coureurs doivent répondre : de résultats bien sûr, mais aussi le fait de coller à l’image de l’équipe, l’impact des réseaux sociaux, car c’est toujours un plus pour nos partenaires de signer un coureur qui a une communauté importante. C’est une réflexion collégiale », expliquait le Savoyard. Le recrutement est donc un des process, comme celui du calendrier des coureurs, qui a été revu et adapté avec une approche plus rigoureuse et méthodique afin de ne négliger aucun détail.
Les vélos Van Rysel, le facteur X
Déjà donc, dès 2023, les bases d’une structure mieux rodée étaient posées. Mais le véritable coup de boost est arrivé en fin d’année : après trois comme co-sponsor, le constructeur automobile Citroën décide de ne pas reconduire son engagement et se retire avec un bilan plus que mitigé. Un arrêt que Vincent Lavenu and co avaient certainement anticipé. En novembre, ils annoncent l’arrivée de Decathlon dans l’équipe, leader mondial des équipements sportifs, avec plus de 14 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Le mastodonte sportif associe non seulement son nom à la structure, mais il apporte également ses vélos, les Van Rysel, et une approche rigoureuse et ambitieuse de la performance.
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Et là, c’est le « perfect match ». « Honnêtement, ce n'est pas seulement un sponsor, c’est un vrai partenaire, car on est tout le temps en contact avec eux », nous confiait Felix Gall, 6e du dernier Tour de France, au départ du dernier Paris-Nice. Et pour cause : en confiant ses vélos à l’équipe, Decathlon ne cherche pas seulement à se faire de la promotion, mais aussi à perfectionner sa machine. Au profit de la désormais Decathlon-AG2R La Mondiale Team. Car il s’agit du véritable tube de l’année : tous s’interrogent sur ce vélo supersonique, qui a transformé certains coureurs. « Avec la densité de niveau global, le niveau de préparation des coureurs, c’est dans les détails que se cachent la performance et le matériel en fait évidemment partie », nous expliquait Jean-Baptiste Quiclet, directeur de la performance de l’équipe, avant de parler « d’une différence qui peut aller jusqu’à 10 watts entre certains vélos du peloton actuel ». Sans nul doute que le Van Rysel fait partie du haut du panier.
Poursuivre la dynamique et prouver sur le Tour de France
Et au-delà du simple aspect performance et qualité de la machine, la conviction d’avoir un vélo au top niveau a impacté l’approche mentale des coureurs. En 2021, Oliver Naesen ne disait pas autre chose pour souligner l’importance du matériel : « dans le vélo, c’est souvent une grande partie dans la tête. Si dès le départ tu as dans la tête que tu as un désavantage sur tes adversaires, qui sont plus forts, qui ont du meilleur matériel, ce n’est pas bon pour la motivation. Avoir ce nouveau super matériel, c’est un poids en moins sur nos épaules ». Ce sentiment, déjà valable avec les BMC de l’époque, doit être décuplé face aux données des nouveaux Van Rysel. D’autant qu’en plus du matériel, un changement de mentalité a été inculqué au sein de l’équipe, coureurs et staff compris, notamment porté par Sébastien Joly, nouveau transfuge de Groupama-FDJ. Un véritable esprit de la gagne, plutôt que de viser des places d’honneur, a été transmis avec une réelle contagion. Et comme souvent dans le sport et dans le cyclisme, une dynamique s’est enclenchée, et un succès en appelant d’autres, les coureurs ont engrangé une confiance en soi positive qui contribue également aux 24 victoires et plus de 10 000 points UCI des Savoyards.
Reste à savoir si cette dynamique va finir par s’essouffler, et le Tour de France sera un excellent moyen de le tester. Les hommes de Vincent Lavenu ont toujours été au rendez-vous en juillet, même sous Citroën. En début de saison, le fondateur de l’équipe avait affiché l’objectif de glaner une étape sur chacun des Grands Tours. Contrat rempli sur le Giro, mais l’adversité sera encore supérieure au départ de la Grande Boucle à Florence. Avec un collectif construit autour de Felix Gall ou Benoît Cosnefroy, l’ambition peut être élevée. Verdict dans quelques semaines.
équipe que j admire