Grâce à l'arrivée d'un nouveau partenaire chinois, le vendeur de vélo XDS, Astana Qazaqstan s'est lancée dans un gros recrutement afin de réaliser l'exploit de se maintenir en World Tour, malgré un retard déjà conséquent. Peuvent-ils y parvenir? Analyse.
En grande difficulté depuis deux saisons, le seul sponsor d’Asie Orientale du monde professionnel, Astana Qazaqstan, cherchait désespérément un partenaire suite à de gros problèmes financiers. Et le miracle est arrivé avec la venue de XDS, un vendeur de vélo chinois, bien décidé à remettre l'Asie sur le devant de la scène du cyclisme mondial. Mais n'est-ce pas trop tard ? En effet, le système de montée et relégation en World Tour se fait par tranche de trois saisons et 2025 sera la dernière année du triptyque. Les équipes reléguées en Pro Teams seront connues dès octobre 2025. Et Astana est bien mal en point avec le retard accumulé sur ces deux dernières années. La mission semble difficile voir impossible de l'extérieur. Alors Astana peut-elle réussir l'exploit ?
La situation actuelle :
Affaibli par des finances au plus mal, l'effectif d'Astana n'a fait que perdre en qualité ces dernières années. L'équipe a vu le départ de Vincenzo Nibali et Miguel Angel Lopez en 2022. Un coup dur puisqu'ils étaient les deux principaux approvisionneurs de points UCI. En 2021, Vlasov, Izagirre ou Aranburu avaient déjà quitté le navire sans être remplacés qualitativement, faute de moyens.
Conséquence de cela, l'équipe du Kazakhstan est aujourd'hui au bord du gouffre en termes de points UCI. Seulement 12 292 points marqués sur la période 2023-2025 soit 4000 de moins que Cofidis, actuellement 18e et première équipe non reléguable. 4000 pts, c'est un tiers des points d'Astana. Comment rattraper un tel retard ?
Heureusement, l'espoir est venu du sponsor chinois XDS qui cherchait depuis 2022 a intégré le World Tour. Mais il ne reste plus beaucoup de temps pour se maintenir. Il faut donc réaliser un gros mercato. Pas un souci d'argent en soit puisque le PDG de XDS arrive avec des ambitions : "Pour les années à venir, XDS sera le partenaire principal de l’équipe. On fera en sorte qu’elle ait un budget conséquent et le meilleur soutien technique ». Cependant, il ne faut pas se rater et viser juste.
Un recrutement important mais limité
Forte d'une volonté d'investir massivement pour rattraper son retard, l'équipe Astana a lancé son mercato avec l'arrivée de Bettiol, avec effet immédiat. Mais le problème principal, c'est qu'il n'y a pas de cadors disponibles cette année sur le marché et peu de jeunes à fort potentiel à part du côté des neo-pro mais ce marché est déjà blindé par les nombreuses équipes de développement et les grosses écuries comme UAE. Certains contrats étaient aussi déjà ficelés depuis plusieurs semaines voire plusieurs mois avant l'arrivée de XDS, comme Lenny Martinez chez Bahrain, dont les contacts sérieux datent de mars. Astana s'est donc orientée vers les choix disponibles après le 15 juillet, mais avec l'incertitude d'être en World Tour en 2026, certains coureurs ont forcément déchanté. Malgré cela, la formation kazakhstanaise a réussi de beaux coups :
Alberto Bettiol (avec effet immédiat) - 30 ans
Diego Ulissi (35 ans)
Wout Poels (36 ans)
Sergio Higuita (27 ans)
Aaron Gate (33 ans)
Nicola Conci (27 ans)
KAJAMINI Florian (néo pro talentueux) - 21 ans
Alors, évidemment, ce n'est pas un recrutement de première jeunesse mais on sent tout de suite les idées d'Astana à court terme : marquer un maximum de points UCI. Diego Ulissi continue de gagner et est un vrai scoreur qui pourrait rapporter gros sur les courses continentales. Bettiol est un gros coureur, solide et pas loin d'être un cador. Aaron Gate lui est un spécialiste des courses asiatiques. Encore cette année, il a remporté le Tour Of Hainan et fait 4e du Tour de Taiwan. Quant à Sergio Higuita, c'est une belle carte à relancer. Mais est-ce que cela sera suffisant ?
Astana peut-elle rattraper son retard et se maintenir ? On se projette
Pour se projeter, nous avons calculé les points potentiels d'Astana en ajoutant ceux des recrues en 2024 et en soustrayant les points de ceux qui sont partis, permettant ainsi une projection sur les points possibles en 2025. Parmi les départs significatifs, celui d'Alexey Lutsenko est la plus grosse perte avec 500 pts qui s'envolent. Les départs de Cavendish (247 pts à date en 2024) ou Battistella, 215 pts, sont moins importants mais comptent quand même. En gros, si on cumule les départs, on atteint 1601 pts sur 2024 (voir tableau ci-dessous).
A l'inverse, les recrues cumulent 4896 pts jusque là dont 1528 pour le seul Alberto Bettiol, qui a signé avec effet immédiat et porte déjà les couleurs d'Astana. Avec les classiques canadiennes et italiennes qui se profilent, l'Italien pourrait offrir de précieux points à sa formation et se rapprocher de Cofidis et DSM avant la fin de l'année. Objectif, réduire l'écart avant la fin de saison, si possible vers les 3500 pts de retard.
Car lorsque l'on fait la différence entre les départs et les arrivées, on se rend compte que la balance de points UCI est très largement positive avec un bilan de 3295 pts, si l'on reprend les performances de 2024. Et ça sans compter un calendrier adapté pour ces coureurs dans la course aux points et d'éventuels autres recrues. Car pour le moment, Astana n'a que 22 coureurs sous contrat. Il y aura évidemment des prolongations de coureurs Kazakhs mais qui interviendront sûrement au dernier moment. On attend surtout de nouvelles arrivées, et notamment du côté du pôle sprint, déterminant dans la course aux points.
Mais alors, qui recruter pour atteindre le palier des 4000 pts, représentant le retard provisoire à combler à l'instant T ? Deux coureurs attirent notre attention : Fernando Gaviria pour compenser le départ probable de Cavendish ainsi que Ivan Sosa, qui peut briller sur les courses à étapes en Continental et relancer sa carrière, à l'arrêt chez Movistar. Si Gaviria ne vient pas, un coureur comme Phil Bauhaus serait une bonne opportunité.
Au-delà des recrues pour 2025, la fin d'année sera importante pour commencer déjà à réduire le retard. Les Canadiennes et Italiennes avec Bettiol vont être cruciales mais aussi des courses asiatiques comme le Tour d'Istanbul et surtout le Tour du Langkawi. La course est classée Pro Series et peut rapporter pas mal de points avec une concurrence souvent très faible. Y envoyer un Harold Tejada et un Harold Martin Lopez, 5e du Tour de Turquie, serait une bonne idée pour viser une victoire et un top 5-10. Quant à Alexey Lutsensko, il doit tenter, avec Bettiol, de scorer un maximum en terres italiennes, à moins que son esprit soit déjà ailleurs. Dans ce cas, Simone Velasco voir Samuele Battistella, déjà très bon en fin d'année par le passé, auront un rôle à jouer.
Conclusion, à la question : Astana peut-elle rattraper son retard on répond OUI, contre toute attente. Alors, évidemment on n'y mettrait pas notre main à couper et la tâche s'annonce très difficile. Mais ce n'est pas si impossible que cela. Ça ne va pas être évident, d'autant que Cofidis a bien recruter et que DSM à des jeunes talents comme Onley ou Poole mais ce n'est pas impossible. Les prochaines recrues vont être déterminantes pour Astana concernant leur chance de maintien. On se positionnera alors plus clairement sur les chances de maintien ou non. Mais, le rêve est permis selon nous avec un calendrier bien choisi.
Attention aussi, avec ce recrutement, Astana peut aussi assurer une place de 1ere ou 2e meilleure équipe Pro Team et être automatiquement invitée sur les grandes courses du calendrier comme les Grands Tours. Et d'ici le mercato 2025, Astana pourra encore se renforcer.
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